Jean-Marie VERRIER, technicien chez Soufflet agriculture, témoigne avec Arnaud PAMART, agriculteur en Seine et Marne, sur les ravages de la septoriose
Les fongicides à base de triazole sont une classe de fongicides largement utilisée dans l'agriculture pour protéger les cultures contre diverses maladies fongiques. Les triazoles agissent en inhibant une étape essentielle dans la biosynthèse de l'ergostérol, un composant clé de la membrane cellulaire des champignons. En l'absence d'ergostérol, la membrane cellulaire ne peut pas se former correctement, ce qui empêche la croissance et la reproduction des champignons.
Les triazoles sont considérés comme des fongicides systémiques, ce qui signifie qu'ils sont absorbés par la plante et peuvent se déplacer à l'intérieur de ses tissus. Cela leur permet de protéger la plante non seulement à l'endroit où le fongicide a été appliqué, mais également dans les nouvelles parties de croissance.
"A la fin du printemps dernier, un céréaliers de Seine-et-Marne, Arnaud PAMART, m’a appelé très inquiet. Deux de ses parcelles de blé semblaient contaminées à la septoriose, malgré le programme de protection dont elles avaient fait l’objet. J’étais plutôt surpris, car il s’agit d’un agriculteur très méticuleux qui connaît bien la physiologie des cultures et les solutions de protection des plantes.
Arnaud PAMART : " Les deux parcelles sur lesquelles nous avons eu des attaques fulgurantes de septoriose se trouvent à 15 km de la ferme. Lorsque j’ai sorti l’automoteur pour le second traitement de mes blés, il m’avait déjà semblé, en l’observant depuis ma cabine, que la culture n’avait pas vraiment son aspect normal. Et au moment du T3, c’était le feu dans la parcelle ! "
Par ailleurs, l’exploitation de ce client se trouve dans le bassin entre Nangis et Mormant, caractérisé par des limons profonds qui restent humides, les pressions septoriose y sont généralement fortes. L’agriculteur l’a bien compris et il sait que la protection est capitale pour préserver son rendement. Pas question, pour lui, de faire l’impasse sur les traitements qui protègent le blé en végétation contre la septoriose, mais aussi la rouille et la fusariose. Il traite généralement trois fois.
La campagne 2020-2021 ne dérogeait pas à la règle. Pour le premier traitement à un nœud, c’est une association de triazoles et de soufre qui avait été choisie. Pour le traitement dernière feuille étalée, il s’agissait d’une association d’un nouveau fongicide de triazole et de SDHI. Pour finir, à l’apparition des étamines, deux autres triazoles ont été appliquées ( pour maitriser la fusariose)."
"Une fois sur place, j’ai constaté le mauvais état sanitaire des blés, en particulier sur une parcelle où une variété sensible à la septoriose était implantée. La pression était vraiment importante, et semblait même supérieure à celle enregistrée sur des parcelles d’essais témoin Soufflet non traitées. Il faut dire qu’en plus de l’effet terroir (humidité), le précédent pomme-de-terre avait débouché sur une forte densité des blés favorable aux contaminations. Mais cela ne pouvait pas être suffisant pour expliquer la situation. J’ai tout de suite suspecté une apparition de résistances.
Grâce à l’intermédiaire d’Adama, nous avons envoyé des échantillons à l’INRAe et à Biotransfer pour en avoir le cœur net. Les analyses ont mis en évidence une fréquence très élevée des phénotypes MDR, CAR R et, notamment aussi des nouveaux phénotypes hautement résistants aux SDHI (CARHR )et hautement résistants aux dernières triazoles , moins marqué cependant."
"Au final, l’agriculteur a enregistré une perte d’environ 20 qx/ha avec un poids spécifique très faible (grains peu remplis et 73 de PS). Si le choix de variétés moins sensibles à la septoriose est un des premiers leviers pour lutter contre la maladie, l’apparition des résistances est loin d’être une chimère, notamment vis à vis de solutions ‘unisite’. "
Arnaud PAMART : " Les rendements ont été catastrophiques, avec seulement 85 quintaux/ha. Alors qu’avec un blé de patate, on aurait dû enregistrer les meilleurs rendements de nos deux exploitations réunies. Sans parler du poids spécifique… un vrai blé à poules ! Les analyses ont montré que ces dégâts étaient le fait de phénotypes de septoriose résistants. L’année prochaine, on va essayer d’autres solutions fongicides. Mon distributeur m’a parlé de SESTO à base de folpel qui, parce qu’il est multi-site, permet de contourner l’apparition de ces phénomènes. Nous allons l'essayer pour préserver notre capital rendement. "