Sur la durée de son cycle, la betterave a besoin de 600 à 700 mm d’eau. Il s’agit d’un élément clé dans le processus de photosynthèse et de transport des éléments minéraux. En situation de déficit hydrique prolongé, le potentiel de rendement est compromis. L’irrigation peut alors compenser et sécuriser la récolte.
Le changement climatique se manifeste notamment par des épisodes de stress hydriques plus fréquents et plus intenses, potentiellement préjudiciables pour la culture de la betterave à sucre. C’est en effet le résultat d’une étude menée par l’ITB, entre 2000 et 2018, sur l’ensemble des régions productrices de l’Hexagone. Avant 2018, les situations où le stress hydrique est de faible intensité sont majoritaires par rapport aux situations où le stress hydrique est jugé « de forte intensité ». Après 2018, le rapport s’inverse, les situations de stress hydriques intenses représentent désormais 47 % des situations contre 13 % avant cette date. Les zones jugées préoccupantes, liées à ce stress hydrique de forte intensité, sont principalement recensées dans les départements de l’Ouest (72, 61) et du Centre (41, 45, 28). Les régions de l’Est sont, elles aussi, de plus en plus concernées.
On parle de stress hydrique lorsque la plante ne peut plus puiser d’eau dans la réserve utile (RU). Cette réserve utile est constituée de deux compartiments : la RFU, réserve facilement utilisable et la RS, réserve de survie. Lorsque la réserve en eau passe sous le niveau de la réserve de survie, la betterave passe en situation de stress hydrique.
Un stress hydrique trop intense pénalise le développement de la plante et des racines et impacte inévitablement le rendement en poids brut. Même si la sécheresse est susceptible de concentrer le sucre dans la plante, cela ne compensera pas pour autant la perte en poids brut en cas de sécheresse trop intense.
Par ailleurs, le manque d’eau au printemps peut limiter l’efficacité de certains herbicides racinaires. Sans compter le fait qu’une plante en état de stress hydrique est aussi plus fragile : elle est plus vulnérable aux attaques de ravageurs et de maladies. Enfin, sur le plan mécanique, notons aussi qu’en fin de campagne, un sol trop sec peut pénaliser, voire rendre impossible, les chantiers d’arrachage.
Des outils de pilotage qui se basent sur les bilans hydriques permettent de déclencher le cas échéant l’irrigation. L’outil Irribet par exemple, développé par l’ITB, est spécialement dédié à la culture de la betterave. À partir des données météorologiques pluviométriques, d’évapotranspiration, de la réserve utile, des dates de semis, l’outil indique à quel moment il est nécessaire de déclencher l’irrigation.
La betterave à sucre a besoin d’eau tout au long de son cycle. Toutefois le préjudice lié à des stress hydriques de fin de cycle est moindre. Aussi, les apports précoces sont à privilégier et seront mieux valorisés par la culture. De plus, au-delà d’une certaine date, la probabilité du retour de la pluie est bien plus forte.
Des essais longues durées menés par l’ITB (2006/2023) dans le département du Loiret, indiquent qu’en l’absence de pluies suffisantes, l’irrigation s’avère être payante sur le plan économique dans chaque situation (modalités irriguées sans contrainte de volume) en comparaison à des modalités non irriguées (scénario réalisé avec une tonne de betteraves payée 40 euros). Dans ces essais, les apports d’eau après le 15 août ne semblent pas montrer d’intérêt, sauf si l’absence de pluies est manifeste. Par ailleurs, un autre réseau d’essais confirme que même dans les situations sous contraintes (interdiction d’irriguer au-delà de la mi-juillet), l’irrigation, même arrêtée précocement s’avère intéressante sur le plan économique par rapport à une modalité « non irriguée ».
Quoi qu’il en soit, l’irrigation reste une charge pour le planteur, il est donc indispensable d’en optimiser l’usage pour que la marge brute reste positive.